Chère Lectrice, Cher Lecteur,
Si tu viens me voir ici depuis longtemps, tu sais peut-être déjà que je suis Taureau, ascendant psy du dimanche.
Je t’explique : je traduis les paroles de l’être humain pour te livrer les pensées inavouées qu’elles dissimulent.
Dans notre jargon, nous autres experts appelons ça : de la « psychologie de psychouilleux ».
Je t’avais déjà livré un extrait de mon talent en la matière dans ce billet, qui date un peu, je l’admets.
Comme j’aime livrer mon savoir, les acquis de mon expérience, et, par dessus tout, faciliter la compréhension des êtres humains entre eux, me voici de retour avec une nouvelle série de traductions.
Tu te reconnaitras peut-être dans certaines. D’autres t’apporteront, je l’espère, des clés précieuses pour ta réussite, sur tous les plans.
Comme je sais ne pas être la seule experte dans cette discipline, je t’invite à m’indiquer tes éventuelles observations, traductions et autres recommandations : c’est toujours agréable de discuter, entre professionnels.
Voici :
**« 5 minutes »
Indication de temps proposée en réponse à toute sollicitation se rapportant à :
- Un coup de main – « Je suis à toi dans 5 minutes »
- La question « quand ? » – « Ho ben… d’ici 5 minutes »
- Toute demande de service et/ou d’attention de la part de votre enfant – « Oui ! 5 MINUTES, J’AI DIT ! »
En vrai :
La signification du concept des « 5 minutes », qu’il soit introduit dans une phrase plus vaste ou qu’il se suffise à lui-même, peut être fluctuante. Cela dépendra de l’humeur de la personne qui la prononce, de l’urgence de la situation, et de moult autres paramètres non maitrisables.
Signifie « dans 20 minutes » si elle répond à une demande d’aide, une exigence enfantine ou à la question : « quand comptes-tu m’envoyer ton dossier X pour le client Z ? ».
Signifie « dans 2 secondes » lorsqu’elle est prononcée après la phrase : « Je vous donne 5 minutes pour arrêter de hurler, ou je vous envoie dans votre chambre ! ».
Entre les deux, la notion de « 5 minutes » est étirable et rétractable à l’envie et ne désigne la réelle durée de 5 minutes qu’en de très rares occasions.
**« Je vais me fâcher »
Information présentée sous l’angle performatif et destinée à laisser entendre que la suite logique à une situation présente serait une grosse colère (a priori, d’ici « 5 minutes »…).
En vrai :
Signifie « je suis déjà hors de contrôle et telle que tu me vois, je tente de rassembler le dernier gramme de résistance nerveuse qui me reste pour me calmer ».
En cela, l’expression « je vais me fâcher » est davantage un constat qu’une mise en garde.
**« Ha ouiiii !… » (les points de suspension ont leur importance ici)
Témoigne d’une manifestation d’enthousiasme d’un parent à l’égard d’une information que son jeune enfant vient de lui délivrer.
En vrai :
Signifie « tu as 2 ans et demi et ton français est encore aléatoire. Je n’ai rien compris à ce que tu viens de dire. J’ai des scrupules à te faire répéter parce que je t’ai déjà fait redire 15 fois ta phrase précédente. Mais je t’aime, quoi que tu dises. »
**« Je suis fatigué(e) »
Annonce un état psychologique précaire.
En vrai :
Signifie « Je sui à deux doigts de pleurer » ou « Je suis à deux doigts de crier ». Parfois les deux.
En cela, face à l’occurrence d’un « je suis fatigué(e) » : fuyez, partez. Courez sans vous retourner.
**« Ce n’est pas toi le problème »
Lors d’un différend, de quelque sorte qu’il soit, vise à rassurer l’interlocuteur sur sa valeur en tant que personne.
En vrai : « le problème c’est que je trouve que tu te comportes comme un(e) imbécile. Je suis fatiguée, je vais me fâcher dans 5 minutes ».
**« C’est sans doute moi »
Vise à laisser entendre que je considère comme probable que le blâme me revienne.
En vrai :
Signifie « En fait c’est toi le problème, et je n’ai aucun doute là-dessus. Je laisse entendre que je pourrais être fautive, comme par un drôle d’élan d’humilité. Mais en fait, je t’offre une occasion d’admettre dignement que tu as bien vu que tout ça, au fond, c’était de ta faute. »
**« Oui »
Signifie un accord.
En vrai :
« Oui » veut dire « non » en de multiples circonstances. Sauf lorsqu’il veut dire « oui » (réalité variable suivant les personnes).
**« Peut-être » ou « Faut voir »
Expression proposée en réponse à la soumission d’une idée, d’une requête, ou de demandes de toutes sortes.
En vrai :
Signifie « mon instinct me hurle de te dire non ».
En cela, les expressions « peut-être » et « faut voir » peuvent être une solution intermédiaire, pour les personnes qui en ont assez de dire « oui » alors qu’elles pensent « non ».
**« Je ne t’ai pas encore répondu parce que je prenais le temps de réfléchir à ta question »
Plutôt clair.
En vrai : « C’était quoi la question ? »
**« J’aime passer du temps avec toi » ou « Je tiens beaucoup à ce que nous avons »
Annonce le plaisir éprouvé en compagnie d’une personne avec laquelle l’émetteur entretien une relation privilégiée : de type amitié ou romance.
En vrai : expression complexe et à double tranchant.
Signifie, suivant les cas :
- « Je t’aime mais je suis trop pudique/timide/fier pour te le dire à haute voix »
- « Je sais que je ne tomberai jamais amoureux (-se) de toi, mais j’aimerais que nous continuions à nous voir parce que le sexe avec toi est exceptionnel »
**« On s’appelle »
Annonce une conversation téléphonique devant survenir dans un délai indéfini pouvant aller d’une semaine à 6 mois.
En vrai :
Signifie « je ne compte pas t’appeler, mais tu peux m’appeler, toi, si tu veux : et peut-être même que je répondrai»
**« Demain »
Concept temporel désignant le jour survenant juste après aujourd’hui.
En vrai :
Désigne n’importe quel moment de la vie qui ne soit pas aujourd’hui. Devant arriver dans un délais extensible, estimé à 15 heures minimum et pouvant aller jusqu’à 6 mois.
Au-delà de 6 mois, si la chose annoncée pour « demain » n’a toujours pas eu lieu, c’est que nous nous trouvons dans ce cas particulier et non moins courant, dans lequel « demain » veut en réalité dire : « jamais ».
Lectrice, Lecteur, voilà pour le moment.
Toi aussi tu veux ta couverture personnalisée d’ouvrage psycho des éditions Grain de sel ? (Cf photo) Partage l’une de tes théories psychologiques de haut vol en commentaire de ce billet, et tu recevras en retour le pdf de ta couverture de livre rien qu’à toi (pense à me préciser ton titre professionnel : Docteur, Professeur, Grand Maître…).
Voici la galerie des couvertures que vous avez déjà gagnées. Qui en veut ?
** « café !!! »
Signifie pour tout être partageant son bureau avec d’autres bipèdes de la même espèce qu’il est temps de faire une pause.
En réalité, cela fait 10 min que la personne regarde l’horloge qui exceptionnellement en met 20 pour atteindre l’heure de grâce (10h).
Valable aussi vers 16h…
et vers 21h30 (sous le nom de « Pisse mémé ! »)
Grand Maître en « feicrastignantise » !
Merci ! Quelle belle contribution !
Je te prépare ta couverture, Grand Maître.
** « PDBBM »
Acronyme d’une expression courante et un peu grossière, permettant de libérer soit une douleur profonde après avoir posé un pied nu sur un Lego en pleine nuit avant d’éponger une gastro, soit d’exprimer une forme d’extase après avoir réussi un challenge à priori inaccessible.
Parfois, les mots ne sont pas à la hauteur ni de la douleur, ni de l’extase ressenties mais font du bien quand même
nan mais sérieux on devrait écrire un bouquin là-dessus, ça te dit?
Ben oui ça me dit !
Que c’est beau ! Merci et bravo : tu as gagné ta couverture de bouquin.
« Je n’ai pas bien compris », que l’on retrouve également sous la forme de l’expression « pardon ???? » avec moults points d’interrogation marquant un ton de surprise mêlé d’impatience, voire d’une légère pointe d’exaspération.
Expression relativement claire, signifiant notre incompréhension face aux paroles de notre interlocuteur.
En vrai : nous avons très bien compris notre interlocuteur de moins d’1m20, mais celui-ci ayant été, au choix, malpoli (« et s’il te plaît c’est pour les chiens bordel ???), insolent (« QUOIIIIIII ??? Qu’est ce que tu viens de dire ???? Non mais je rêve, chéri, tu as vu comment il m’a parlé ???!!!!!) ou ayant utilisé un langage totalement inapproprié (cf. Pr Cécile de Clermont), il est important de lui faire 1/ prendre conscience de sa boulette et ainsi lui permettre de rapidement la corriger, ou 2/ répéter ladite boulette et ainsi se retrouver à employer l’expression « je vais me fâcher ».
Professeur Spipile (en retard pour la sortie de l’école et qui rit encore de ton merveilleux article) (fucking périnée)
Ha ouais ce « pardon ??? » faudrait que je le rajoute 😉
Professeur Spipile, je te prépare ta couv dès que j’ai 5 minutes. Merci et bravo : le monde de la psychologie parentale te doit beaucoup !
** 42
Nombre entier compris entre 41 et 43.
En vrai : réponse type de la mère indigne face à une avalanches de questions saugrenues, en référence à Douglas Adams.
Significations :
« je ne comprend rien à ta question, et là au cas tu n’aurai pas remarqué, j’ai les mains dans la vaisselle et les pieds dans la lessive, je suis pas super dispo ».
« ça fait 10 min que tu tourne autour du pot, je te vois venir avec ton arnaque, me prend pas pour une quiche ».
(en mode hurlement primaire) « 53 questions à la minute, passé 19h30, c’est pas gérable ! »
Haha ! Belle contribution !
J’ai du retard de lecture, moi ! Quel merveilleux billet, il sonne très juste. 🙂 Pas de contribution de mon côté, j’ai une partie du cerveau concentrée sur un sujet pro, l’autre en train de fondre.
Merci Emilie ! J’espère que tu n’as pas fondu complètement 😉