Il y un sujet sur lequel j’ai envie d’écrire ici depuis longtemps : le changement de vie.
Testé pour vous par Marie Grain de Sel. Doublement.
J’ai changé de vie. J’ai réalisé mes rêves par lot de deux : partant loin de là où j’étais, et changeant de vie professionnelle.
Changé de ville, changé de métier. Changé de réalités de partout.
Mille fois, j’ai voulu faire le rapport de tout ce qui se passait pendant que ça se passait.
Mille idées me sont venues, mille observations sur toutes les complexités de ce que le changement imposait à tout le monde : à moi, à mon couple, à mes enfants, à mes amis. À mon banquier et à la Matmut…
J’ai noirci des pages de carnets, j’ai théorisé de cent manières différentes chaque étape, chaque drôle de réaction psychologique ou psychosomatique qu’induisaient les changements.
Et pas une seule fois je n’ai pu prendre mon clavier pour rendre compte de ce que je vivais.
Aucun recul.
Aucune possibilité de m’arrêter sur le bas côté pour observer la rocaille et les bosses, qui, alternant avec les plats confortables et les émerveillements, avaient rendu ma route si… fascinante. Extraordinaire (et c’est pas fini !).
Et il y a quelques mois, je répondais à Gaëlle à propos de mon exode urbain (c’était ici).
Aux réactions enthousiastes, aux courriers pleins de sourires que j’ai reçu (de vous) à l’époque, j’ai su que le moment d’en parler en détail approchait.
Encouragée par vos jolis mots et votre chaleur, j’ai compris qu’il était important de partager nos expériences de changements de vie. Parce que mon double changement était un choix. Et qu’il s’agissait de rêves que j’allais (enfin) réaliser.
Qu’avant d’oser enfin, beaucoup restent sur le pas de la porte. Parfois durant de nombreuses années.
Moi, il m’a fallu 10 ans, 5 ans… 30, sans doute.
Alors je sais. Je sais l’envie qui gronde au fond des tripes. Je sais les doutes, les questions, les freins, les sabotages que l’on maquille en bonnes raisons. Les montagnes russes de l’auto flagellation. Les mensonges qu’on se raconte et qui ont la vertu de réconforter, mine de rien. Les tristes résignations bien fondées. Les remises à plus tard.
Et surtout, je sais combien lire des histoires de changements de vie a contribué à nourrir l’énergie qu’il m’a fallu (qu’il me faut encore) pour concrétiser ce qui, au fond de moi, était impatient de voir le jour.
J’ai donc décidé de vous parler du changement de vie. Des billets suivront celui-ci parce que le sujet est trop vaste pour tout vous dire aujourd’hui.
Mon histoire de changement sera une histoire de rêves réalisés. Parce que c’est sous cet angle que j’ai pratiqué la chose. Et ça n’a rien de réducteur parce que, à mon avis : les histoires de changements de vies subis et les histoires de changements de vies choisis ont beau ne pas être les mêmes, elles ont de nombreux points communs.
S’il m’a fallu tout ce temps pour écrire sur ce sujet, c’est aussi parce que je cherchais le début de la pelote. Je sentais qu’il y avait un point de départ à trouver. Un concept qui me permettrait d’ouvrir la porte et d’entamer la discussion.
Et il y a quelques semaines, j’ai enfin trouvé.
Un an de digestion : un mot.
LE mot. Je pourrais même m’en tenir à celui-là et laisser le reste de l’histoire se raconter de lui-même.
Au noyau de l’envie et de dizaines d’années à échafauder la réalisation du rêve, il y avait une notion, une idée, un indispensable.
La disruption.
Pour moi, c’est là que le premier souffle du changement de vie prend sa source.
La disruption, ce n’est pas du français, c’est de l’anglais.
Mais bon, c’est facile, ya qu’à lire : « ruption » comme dans rupture (du latin « ruptare »… « ruptus », « ruptatum », ou quelque chose d’approchant)(oui j’ai fait du latin, mais j’ai beaucoup trop rigolé avec mon copain Antoine pendant les cours pour rendre cette traduction moins approximative). Et « dis », comme dans la division. Disruption, comme dans un truc qui fait « crack » et qui part de travers.
On y est. C’est bien ça.
Moi je le dis en français : Disse Rupe Scions. Avec mon accent bien de chez nous.
Et j’en fais un mot de mon vocabulaire, même s’il n’existe pas officiellement : parce que la disruption, c’est devenu mon quotidien.
Disruption vient des sciences et désigne ce qui cause confusion et désordre. Ou encore ce qui marque une interruption dans un processus qui suivait un chemin défini.
Follement mais surement, ça veut aussi dire : ce qui détruit afin de préserver le fonctionnement fondamental. Paradoxale, inquiétante et radicale. La disruption.
Elle désigne le chaos qui permet de dépasser l’existant, l’évident, l’habituel. Pour pouvoir créer, avancer, inventer en tout nouveau. En jamais vu.
Dans disruption, il y a « je fous un bon coup de pied dans tous mes repères et j’en réinvente des tous neufs même si je n’ai aucune idée de ce que je fais».
Dans l’univers de la publicité, « Disruption » est utilisé pour désigner une méthodologie qui libère la créativité à partir de la rupture d’avec les conventions, préjugés et idées reçues.
Voilà. J’ai mon mot. Et déjà, j’ai dit tout ce qu’il faut retenir. Tout ce qu’il faut savoir avant de changer de vie.
Le changement, il est en chacun de nous. L’être humain le porte en lui naturellement. Le changement délibéré, le changement dans l’urgence, imposé. Pour avancer ou pour s’adapter. Pour survivre, bien souvent.
Quand changer est un rêve, comme tout rêve, l’idée vit en nous. Pendant des années, le rêve est là, il existe.
La disruption est la première porte pour passer du rêve qui existe au rêve qui se réalise. Pour entrer enfin dans la phase de concrétisation.
Rêver, c’est vivre (cf. « L’espoir fait vivre », c’est pas moi qui l’ai dit).
Disrupter, c’est ouvrir la porte pour vivre le rêve.
Changer de vie et changer de métier, c’est faire disruption dans sa propre vie. Causer le chaos, détruire ce qui existait, briser la ligne droite et réinventer une vie selon un modèle que l’on devra créer de toutes pièces. Parce qu’il ne sera pas celui dans lequel nous avons grandi, il sera tout autre que le chemin que nous avions tracé jusqu’alors.
Parfois même, réaliser un rêve impliquera d’aller à l’encontre des valeurs et des idées dans lesquelles nous avons été élevés. Contre l’avis de tous, face à l’incompréhension et aux questions. La disruption peut prendre bien des aspects. Jamais simple, le désordre qu’elle crée est plus ou moins dramatique : suivant les personnes, suivant les histoires.
Mais toujours, pour accomplir le rêve de changer de vie, il y aura disruption.
Ceux qui « sautent le pas » n’ont rien fait de plus qu’attraper leur rêve des deux mains pour le mettre face à la première réalité de son accomplissement : la rupture bordélique.
A partir de là, charge à à nous d’inventer nos propres réponses pour chacune des questions que soulève la disruption. En mélangeant les héritages des repères connus avec la création de repères inédits.
Je n’ai pu m’atteler à la réalisation de mon double changement qu’une fois que j’ai absorbé l’idée que j’allais tout chambouler dans ma vie. Je le dis comme si c’était facile. Aujourd’hui.
À l’époque, c’était le plus compliqué.
Parce que pour passer d’un bord à l’autre, il m’était indispensable de créer ce chaos d’où tout allait prendre vie.
Abandonner une partie de moi avec la vie que je quittais. Me réinventer une vie, me réinventer moi-même dans la vie que je commençais. Tout revoir mais en gardant les fondations de moi et de tout ce qui m’était essentiel.
Changer de vie, je l’ai vite constaté, c’était rompre avec le chemin que j’avais pris jusqu’alors et avoir l’impression de ne jamais avoir été aussi bien qui je suis. Dans les remue-ménages, me sentir plus vivante que jamais : vivante de ne rien savoir, d’être perdue, en sentant que j’avais enfin compris quelque chose d’indispensable à mon histoire. Mais sans savoir quoi.
La disruption, si on ne peut s’en passer dans une telle situation, est quelque chose qui se vit de manière très intime. Et c’est pour ça, à mon avis, que réaliser ses rêves prend des visages si variables et se fait dans des délais si différents d’une personne à l’autre.
Et la disruption est primordiale, parce qu’elle permet de poser la seule réponse tangible aux milliers de questions qui jalonneront le chemin. Et cette réponse reviendra comme leitmotiv du changement de vie : « JE NE SAIS PAS ».
La disruption.
Voilà pour moi la première pierre posée en matière de changement de vie. La première graine. Le noyau du changement et du rêve qui prend vie.
Et c’est le plus difficile. Et tout le monde n’a pas envie de ça dans sa vie. Voilà pourquoi il n’y a pas de compétition dans la réalisation des rêves. Il n’y a pas de podium faisant la part belle à ceux qui font, laissant sur le côté ceux qui gardent le rêve enfoui précieusement, sans passer à l’étape de concrétisation. Pas de course où ceux qui réalisent à 20 ans seraient meilleurs que ceux qui attendent d’en avoir 75.
Au fond, il y a le choix. Et il y a ceux qui choisissent la disruption et s’y engouffrent en faisant comme ils peuvent. Et ceux qui n’en veulent pas. Et les deux camps se valent.
Pour aller plus loin, je vous propose ces billet qui apporteront des illustrations à celui d’aujourd’hui.
– Sur la zone de confort, le changement, le dépassement de soi :
La vie c’est comme se baigner dans la mer
– Sur ce que l’on quitte :
Et ainsi, Paris, je suis partie
La tournée des dernières
– Sur ce que ça peut avoir de jouissif, aussi, de tout changer :
Chers voisins (parce qu’il faut en profiter pour rigoler hein, sinon ça sert à quoi de tout quitter ?)
Oui mais…si !
Merci pour ce partage, j’y vois un peu plus clair 🙂 J’aime beaucoup le mot de fin « les deux camps se valent », il est positif pour tout le monde !
J’espère que votre vie actuelle vous plaît 🙂
Merci à toi !
Oui, ceux qui franchissent le pas ne sont pas mieux que ce qui ne le font pas : chacun fait ses choix et surtout, chacun fait comme il peut !!!
Oui : le chaos j’aime bien 😉
Wow !
Voilà que je te lis (encore) et que je me dis wow (encore). Tu forces l’admiration.
Donc tu l’auras compris que je suis de ceux qui n’en veulent pas (encore)…
Changer de travail, j’en ai eu envie (après ma première Crevette), je n’ai pas réussi à franchir le pas.
La disruption… peut être… un jour.
Bravo pour la tienne. Tu travailles pour toi dorénavant c’est ça ?
Merci madame la crevette !
Pour nous il y a eu plusieurs étapes en fait. Des petits pas en avant et des retours dans notre vie d’alors.
Parfois on s’en tient à ces petites tentatives et on en reste là.
Nous avons continué jusqu’au grand saut. Le tout c’est que nous avons choisi la disruption, à un moment (alors qu’avant ça, nous n’en avions pas envie; ou il nous fallait plus d’éléments pour réussir à y venir).
J’allais te dire : non, je travaille pour les autres 😉 Je suis à mon compte et je travaille pour apporter quelque chose aux autres, voilà, pour résumer 😉
Merci pour ce billet. J’attends les autres de pied ferme. 🙂 J’ai déjà changé des choses, changé de métier, etc. et là je suis de nouveau à un carrefour et ça n’a rien de simple. J’essaye de ne pas me mettre trop la pression tout en faisant de petits pas pour avancer. Mais le chemin est très long (pour moi en tout cas) !
Merci à toi !
Oui, je crois qu’il n’y a pas un changement, et puis c’est bon, c’est fait. dans le changement, il y a plein d’étapes, et parfois des paliers où on stagne. Et où se remet à se poser 1000 questions.
Pourquoi tes billets me font cet effet de dingue à chaque fois???
Disruption… J’ai entendu ce mot 1 seule fois, et je m’en souviens très précisément.
J’ai choisi une petite disruption l’année dernière, en montant ma boîte. Aujourd’hui on est face à de nouveaux choix de vie, et chaque jour je pense à ton billet sur la zone de confort. J’ai au moins eu 1 réponse à toutes mes questions dans ton billet, que la réponse était « Je ne sais pas ». Alors, merci 🙂
Oui, vivre avec ce « je ne sais pas », c’est libérateur. Et ça permet d’avoir réponse à tout 😉 Merci à toi !
Je me sens concernée par ton billet, même si je n’ai pas l’impression d’être au point de disruption. Mais peut-être que je suis simplement encore inconsciente des changements qui risquent de découler de mes choix (pour l’instant j’ai fait le choix de changer mais je ne sais pas encore pour quoi). Quoi qu’il en soit, je vais lire tes liens ainsi que tes futurs billets car le sujet mérite ma réflexion.
J’aurais peut-être dû le rajouter : j’ai l’impression que la disruption est souvent inconsciente. Tu vois, on a décidé de partir il y a deux ans et demi, et je n’ai réalisé ça que le mois dernier 😉
J’ai tellement envie de changer, de boulot, mais je n ‘ai pas de métier, c’est là que me semble être toute la difficulté car je ne sais rien faire de particulier
Tu « ne sais rien faire de particulier ? » Donc techniquement : tu peux tout faire 😉 Difficile de faire le changement seule, ma Zaza. Il y a encore deux ans et demi, je ne me disais pas : « je pars en Bretagne et je vais monter ma boîte de formation ». C’était en moi, j’en rêvais depuis longtemps, mais je ne le voyais plus, perdu dans tout le reste. Il a fallu une personne pour m’accompagner sur le principe de trouver l’idée qui me correspondait. Puis une autre pour me conseiller, etc.
Donc : le monde est à ta portée. Et surtout : chaque chose vient en son temps, pour TOI ! 😉
Ah, ça y est, tu fais ton coming out ! 🙂 La formation, c’est un domaine proche du mien (celui de ma deuxième reconversion), et j’aimerais beaucoup en faire (pour adultes). Tu conçois et dispenses des formations dans un créneau bien spécifique ? Tu formes les gens à bien communiquer, ce genre de choses ? Même si nous sommes très éloignées géographiquement, ce que tu fais m’intéresse beaucoup.
Les réponses à tes questions : http://www.sinapis.fr/ 😉
Par ailleurs, madamezazaofmars, je suis tout à fait d’accord avec Marie. Pour tout dire, je me suis fait accompagner dans mes démarches de changement, et comme cela me passionne, je me suis moi-même formée à l’accompagnement professionnel, et ça me plaît énormément, j’ai beaucoup de plaisir à accompagner les personnes en questionnement, et c’est quelque chose que je fais bien (ce n’est pas de la vantardise, mais un constat, je suis plutôt du genre à me sous-estimer en général). Ce qui me stresse, à présent, c’est que je dois me lancer en tant qu’indépendante ou trouver une structure, et j’ai la trouille (oui, les cordonniers sont les plus mal chaussés !!), et ça me paralyse.
Meme réaction que LudiM : comment fais tu pour que tes billets me chamboulent à ce point à chaque fois ???
J’aime beaucoup la manière dont tu décris ce changement de vie, la notion de « tout reconstruire » prend vraiment tout son sens dans tes explications.
Si j’avais su je t’aurai posé mille question en décembre dernier en mangeant une raclette 🙂
Merci pour ce billet
Merci Pat ! Oui je trouve qu’il y a de la reconstruction après de la déconstruction, dans le changement. OK, on ne jette pas tout à la poubelle. Mais quand même, le principe est de tourner des pages…
Raclette ? T’as dis raclette ? Attention, j’arrive !!! 😉
Merci Marie, passionnant tout ça ! Tu te déplaces donc pas mal pour ton travail. Je vois que tu es venue dans mon coin pour un de tes clients.
Oui, je suis partouuuuuut ! 😉
En ce moment, pour évoquer ce qui se passe dans ma tête, dans ma vie, je parle de « déclic ». Comme une prise de conscience tournée vers l’action, vers un changement qui doit se produire, mais qui avant doit se construire. Car la disruption, je l’ai en ligne de mire, mais je la prépare. De manière de moins en moins ordonnée, car de plus en plus poussée par l’envie.
C’est drôle que tu publies justement ce billet. Car depuis plusieurs semaines, alors que je suis au seuil de ce changement, je pense beaucoup à toi. Tu m’inspires. Et j’aurais mille questions à te poser.
Alors, quand est-ce que tu passes près de chez moi pour qu’on aille boire ce café / thé (fondue au chocolat ?) déjà évoqué à maintes reprises 😉 ?
Ha on avait dit Fondue au Chocolats ? On a de bonnes idées !
Bon ouais mais j’ai pas de virée à Nantes de prévue là 🙁
C’est quoi à Mi chemin ? Lorient ? On va boire une fondue au chocolat (oui : boire) à Lorient ?
Lorient, ça me paraît le bout du monde :°(