Joie, vulnérabilité, détachement, force et euphorie. Je commencerais par vous donner ces mots-là, qui résument à eux seuls toute l’affaire.
Ça y est : je le fais.
Vous vous souvenez, ce billet ?
Bon ben voilà : j’écris. Un roman. Un vrai, avec 300 pages de mots sortis de ma tête au travers de mes mains.
J’avais envie de vous en parler aujourd’hui, parce que tous les jours j’écris. Et tous les jours je pense à vous. J’aimerais vous raconter ce que ça fait au jour le jour…
Ce n’est pas le fait d’écrire, en soi, que je trouve intriguant en ce moment : c’est ce que ça fait, d’avoir sauté le pas et de répondre à un appel plus grand que tout. Plus grand que moi.
J’écris beaucoup, et depuis longtemps.
À 15 ans, j’ai même eu une période d’à peu près 10 minutes durant laquelle je me suis prise pour Flaubert (je ne développe pas, je me trouve déjà sympa de vous l’avouer ici).
Et j’avais pris l’habitude de faire comme si de rien n’était.
Parce qu’on peut vivre longtemps en s’ignorant. Longtemps, mais à la longue : sans couleurs, ni saveur.
Lutter contre soi-même, c’est fatiguant. Et même : c’est lassant.
Ce que j’y apprends va bien au-delà de la démarche d’écrivain : cela concerne la vie en général, lorsque nous décidons de lui faire confiance… et d’écouter ce qui nous appelle de tout notre cœur, et de toute notre âme.
Hier, j’ai dépassé les 100 pages de mon premier roman.
C’était un cap important. Génial.
Combien de fois ai-je entendu : « tu vas voir, écrire un livre c’est bien plus qu’écrire un livre » ?
Moi je trouvais que réussir à écrire un livre, ce serait déjà pas mal.
Aujourd’hui je réalise qu’ils avaient tous raison : c’est bien plus que juste un roman (euh… même si c’est surtout un roman hein).
Ce que j’y apprends va bien au-delà de la démarche d’écrivain : cela concerne la vie en général, lorsque nous décidons de lui faire confiance… et d’écouter ce qui nous appelle de tout notre cœur, et de toute notre âme.
Voilà ce que j’ai déjà appris, au bout d’une centaine de pages :
1/ Je suis une écrivaine. Point. J’écris un livre et j’apprends, ce faisant, qu’il suffisait de le décider pour être ce que je voulais être : en l’occurrence, une écrivaine.
2/ Je suis cheffe d’entreprise, j’ai deux enfants de 8 et 5 ans, un mari, un bébé chat et à peu près 7 loisirs que j’aime à égalité de passion…. Et j’écris un roman. Je croyais que les écrivains étaient des gens qui partaient dans une maison au bord de la mer, reclus pendant 6 mois, pour pondre leurs chefs d’œuvre. Je ne sais pas si j’écris un chef d’œuvre, mais j’écris un roman, un vrai : et ma vie ressemble à la mienne. Mais en mieux, puisque j’écris un roman.
3/ C’est gagné d’avance.
Une très bonne raison de ne pas écrire de roman, c’est de se rappeler que, très probablement, il sera merdique. C’est vrai, c’est probable. Et improbable à la fois.
En fait… on s’en fout. Complètement.
D’une part, parce que des romans merdiques sont publiés, souvent : je le sais, je les ai lus. Ce n’était pas grave : à chaque fois je me suis dit« ça arrive ». On ne peut pas plaire à tout le monde. Je ne les ai pas aimés, et ils étaient publiés quand-même : pour moi, c’est très prometteur.
D’autre part, que ce roman soit bon ou pas, il sera le mien : celui que j’aurai écrit, moi. Quoi qu’il arrive, j’aurai écrit un roman. Bien sûr que je veux être publiée.
En attendant, je suis une artiste qui vit son art. Je me lève chaque matin et me couche chaque soir en étant une autrice de roman : et ça, personne ne pourra me l’enlever.
4/ l’égo à l’égout.
Et je suis très fière de vous avoir trouvé cette formule, j’aurais dû faire carrière dans la com’, moi…
Ce roman qui sort de mes mains est quelque chose qui me dépasse. Ce n’est pas quelque chose que je fais pour qu’on me reconnaisse, pour qu’on me loue, ni pour être riche. Toutes ces choses, je les accueille avec plaisir lorsque je les reçois. Pour autant, elles ne sont pas le but de ma démarche.
Mon roman est une œuvre d’art qui n’a donc d’autre but que d’exister. Point d’ego derrière tout ça… juste du plaisir.
5/ Et pourtant je doute.
Malgré tout ce que j’écris ci-dessus, malgré la joie indicible dans laquelle je vis mes journées depuis que j’écris : je doute. En permanence. Aussi, j’observe tout un tas de comportements saboteurs ultras passionnants (là je suis en mode « vaut mieux en rire qu’en pleurer », au cas où vous n’auriez pas remarqué).
L’exercice fascinant est le suivant : comprendre que cette vilaine petite voix sera TOUJOURS là. L’accepter plutôt que de lutter. Et continuer d’écrire, jour après jour, comme si son grincement pénible me passait totalement au-dessus de la tête.
Un jour d’ailleurs, j’y consacrerai un billet exclusivement.
Pour l’instant je n’ai pas le temps : j’ai roman
De l’autre côté de ce saut qui vous démange se trouve ce merveilleux cocktail : la joie, l’impression d’être imperméable à la grisaille, d’être invincible, une capacité de travail assez surprenante… et votre grande vulnérabilité.
C‘est ce que ça fait d’être une artiste qui crée, qui ne sera plus jamais une artiste qui se cache.
Et franchement, ça vaut le coup.
Marie-Haude
écrivaine
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PS : il existe un endroit où je partage quelques bouts de ce que j’écris. C’est par ici, si vous êtes intéressés : http://eepurl.com/dbss3r
Ahhhh mais comme je partage cette joie/peine/extase/mais putain qu’est-ce que je fous là que tu racontes.
J’ai décidé d’écrire un roman, c’est un roman d’amour, je veux faire palpiter le coeurs de mes lectrices, je veux créer et inventer une belle histoire avec de chouettes personnages et… c’est génial et hyper rigolo, mais c’est aussi l’occasion de bons moments schizo à base de : « raaaaaahhh mais pourquoi c’est si nul, qu’est-ce qui ne marche pas » (deux minutes plus tard) « Oh ouah, je relis le premier chapitre et je réalise que je me fais rire moi-même. C’est brillant, je vais tout de suite commander un mug « Je suis auteure, et toi, c’est quoi ton super-pouvoir? » (le lendemain) « Agonie, tristesse infinie, pourquoi est-ce que ce roman est tellement CHIANT pourquoi mes personnages ne font pas ce que je leur demande, est-ce possible de devenir écrivain avec beaucoup d’effort si on n’a pas de talent? » (le soir même) « Ah quelle joie d’être écrivain, j’écrirais même si personne ne lisait jamais ce que je fais »
Etc, etc.
Et en même temps, pur acte de foi, je suis en train d’apprendre et de m’amuser comme une gosse qui découvre les maths (oui, je suis ce genre d’enfants qui aimait les maths), qui galère parfois mais qui a l’impression que l’univers vient juste de s’ouvrir et de lui donner un cadeau.
Vive les écrivaines et leur joyeuses créations.
Haaaahaaaaahaaaa !
Je ris mais je pleure mais je ris.
Merci pour ton commentaire si vrai Laure.
Je te propose ceci : je lis ton bouquin et je l’aime. Tu lis le mien et tu l’aimes. Là : ça nous fait au moins une lectrice ! Elle est pas belle la vie ?!